L’OML : une procédure médico-judiciaire essentielle
Lorsqu’un décès survient dans des circonstances suspectes, inconnues ou non naturelles, le médecin qui établit le certificat de décès doit cocher la case "obstacle médico-légal". Ce signalement bloque temporairement toute prise en charge funéraire et place le corps à la disposition de la justice, qui pourra mener une enquête approfondie.
Une gestion rigoureuse de l’OML permet :
- d’assurer le respect des procédures médico-légales ;
- d’éviter toute mise en cause judiciaire de l’établissement ;
- d’informer et d’accompagner les familles dans une période difficile.
L’obstacle médico-légal est une procédure essentielle impliquant une coordination stricte entre les établissements de santé et les autorités judiciaires. Son application permet de concilier enquête judiciaire, respect des droits du défunt et soutien aux familles.
En cas de doute, il est préférable de poser un OML. À l’inverse, l’absence d’OML rend presque impossible une autopsie médico-légale, limitant les possibilités d’élucider les causes du décès.
Les situations requérant un OML
Un OML est requis en cas de :
- homicide ou suspicion d’homicide
- suicide ou suspicion de suicide ;
- décès suspect à l’hôpital y compris ceux consécutifs à des chutes accidentelles (toit, terrasse, escalier, lit, fauteuil) ou des soins médicaux (chirurgie, diagnostic, traitement).
- accidents de la circulation ou du travail ;
- décès en milieu pénitentiaire ou psychiatrique ;
- décès de personnes vulnérables (jeunes enfants, femmes enceintes, personnes sous protection juridique, personnes porteuses de handicaps) ;
- mort subite de l’adulte ou de l’enfant ;
- découverte d’un patient décédé au sein de l’établissement suite à une disparition préalablement signalée ;
- décès inexpliqués dans un contexte de soins médicaux, d’activité criminelle ou de suicide.
De manière générale, si un doute persiste sur l’intervention d’un tiers ou sur la nature du décès, un OML doit être posé.
Conduite à tenir : les étapes clés
- Préservation du corps et de la scène
- Le corps, les vêtements et la scène doivent rester intacts jusqu’à l’arrivée des forces de l’ordre. Ils ne doivent être ni manipulés ni déplacés (article 55 du code de procédure pénale).
- Le personnel de l’établissement doit surveiller le lieu pour en garantir l’intégrité, tout en respectant la dignité du défunt (article L2223-42 du code de la santé publique).
- Alerte immédiate des autorités
- Informer l’autorité judiciaire et la direction de l’établissement.
- Attendre les décisions judiciaires avant toute manipulation du corps.
Suite à l’intervention des forces de l’ordre sur place, deux possibilités :
- l’Officier de police judiciaire (OPJ) ou le Procureur de la République lève immédiatement l’OML. Dans ce cas, le corps du défunt peut être mis en chambre mortuaire et les opérations funéraires préparées par la famille.
- L’OPJ ou le Procureur de la République requière un examen du corps par un médecin (de préférence légiste) sur les lieux de découverte (levée de corps médico-légale, selon l’article 60 du CPP), voire une autopsie judiciaire (d’après les articles 230-28 à 230-31 du CPP). Dans ce cas, le corps est transféré sur réquisition judiciaire vers un institut médico-légal. Le corps est officiellement désigné comme étant "sous-main de justice".
- Gestion des suites de l’OML
- Rédaction d’un rapport circonstancié pour l’analyse ou enquête administrative : le rapport doit être chronologique, horodaté, et doit contenir les informations du médecin qui a posé l’OML. Il est important de ne pas se limiter à la description de la découverte du corps, mais également de bien décrire toute la prise en charge ayant précédé l’événement. Dans tous les cas l’enquête administrative ne devra pas gêner ni interférer avec l’enquête judiciaire.
- Signalement d’EIGS sur le portail de signalement des évènements sanitaires indésirables, dans le cas d’un décès inattendu et potentiellement associé aux soins (l’analyse de l’EIGS permettra de statuer sur la contribution de la prise en soins dans la survenue du décès).
- Communication sans délai à l’ARS (par téléphone ou par un mail), selon les circonstances du décès, si un risque médiatique ou judiciaire existe.
Conséquences d’un OML
Lorsqu’un OML est posé, le corps ne peut être ni inhumé, ni transporté, ni préparé pour des soins funéraires tant que la justice ne lève pas la mesure. Le parquet peut exiger :
- une levée de corps médico-légale (inspection sur les lieux par un médecin légiste) ;
- un examen à la morgue incluant des prélèvements toxicologiques ;
- une autopsie complète.
Contrairement à une idée reçue, l’OML ne signifie pas automatiquement une autopsie ou une levée de corps.
L’OML bloque les actes suivants :
- don du corps ;
- soins de conservation ;
- transport vers une résidence ou établissement ;
- admission en chambre funéraire ;
- mise en bière ;
- prélèvements en vue de transplantation ;
- fermeture du cercueil ;
- inhumation ou crémation.
Les types d’autopsie et le rapport médico-légal
- Autopsie médico-légale ou judiciaire : ordonnée par le parquet pour rechercher la cause du décès. Elle est obligatoire même si le défunt s’y est opposé de son vivant.
- Autopsie scientifique : demandée par la famille ou les médecins pour comprendre les causes du décès, si le défunt n’a pas exprimé d’opposition.
- Autopsie sanitaire : ordonnée par le préfet en cas de risque épidémique, sans consentement familial requis.
Un obstacle médico-légal est une mesure imposée par les autorités judiciaires pour empêcher l’inhumation ou la crémation d’un corps tant que les causes et les circonstances du décès n’ont pas été élucidées. Cela concerne uniquement les autopsies médico-légales, car elles impliquent des suspicions ou des enquêtes judiciaires. Dans les autopsies sanitaires ou scientifiques, il n’existe pas d’obstacle médico-légal, car les décès sont généralement d’origine naturelle ou explicitement expliquée.
Le rapport du médecin (légiste le plus souvent) réquisitionné par l’OPJ (article 60 CPP) est remis à l’autorité judiciaire et à personne d’autre. Ce qui implique la non communication des constatations ou résultats d’autopsie.
Un volet médical complémentaire du certificat de décès sera rédigé ultérieurement par le médecin ayant procédé à l’autopsie (article R2213-1-1 du CGCT).
Le volet administratif du certificat de décès peut être communiqué à tout OPJ qui en fait la demande, même en cas d’absence d’OML (article R2213-1-2 du CGCT).
Dans un établissement de santé, il paraît ainsi primordial de :
- sensibiliser les professionnels notamment médicaux au cadre légal et aux situations devant conduire à la signature d’un certificat de décès avec un OML ;
- établir une procédure interne décrivant ces situations puis les personnes à contacter et actions à réaliser en cas de décès avec OML.