Une baisse du taux de mortalité par suicide, mais une réalité toujours préoccupante pour la région.
Entre 2000 et 2021, le taux de mortalité par suicide en Auvergne-Rhône-Alpes a diminué de 36 %. Cette évolution favorable ne doit toutefois pas masquer la persistance d’un phénomène préoccupant : 951 décès par suicide ont été recensés dans la région en 2021, contre 965 en 2020. Ce chiffre reste largement supérieur à celui des décès liés aux accidents de la route, qu’il dépasse de près de 2,7 fois.
Le 11e bulletin régional sur le suicide, publié en février 2025 par l’Observatoire régional de la santé (ORS), met en évidence des disparités marquées selon l’âge, le sexe, le lieu de résidence ou encore l’indice de défavorisation sociale.
Parmi les principaux enseignements :
- Trois décès par suicide sur quatre concernent des hommes
- Le suicide représente la première cause de mortalité chez les 25-34 ans, et la deuxième chez les 15-24 ans
- La tranche d’âge des 45-64 ans concentre 40,5 % des décès, tous sexes confondus
Par ailleurs, les hospitalisations pour tentative de suicide sont en nette hausse depuis 2019, notamment chez les adolescents et les jeunes adultes (+7,8% par an en moyenne), traduisant une souffrance psychologique croissante. Cette tendance s’accompagne d’une augmentation des décès par suicide chez les 15-19 ans dans la région. Ces indicateurs appellent un renforcement des actions de prévention, en particulier auprès des jeunes publics.
Des dispositifs régionaux pour répondre aux situations de crise et prévenir la récidive
En Auvergne-Rhône-Alpes, deux dispositifs complémentaires sont aujourd’hui mobilisés par l’Agence régionale de santé (ARS) Auvergne-Rhône-Alpes pour proposer une réponse rapide face à la détresse psychique et un suivi adapté après une tentative de suicide.
Le 3114, numéro national de prévention du suicide, offre une écoute spécialisée 24 heures sur 24, 7 jours sur 7. Depuis sa mise en service en octobre 2021, il permet aux personnes en souffrance et à leurs proches d’être orientés vers des professionnels formés à la gestion de la crise suicidaire.
Dans la région, deux centres assurent la prise en charge des appels au sein de la zone interdépartementale de redistribution :
- Centre 3114 de Lyon : 54 349 appels reçus depuis l’ouverture
- Centre 3114 de Saint-Étienne : 37 207 appels reçus
En aval de la prise en charge immédiate, le dispositif VigilanS permet de maintenir le lien avec les personnes ayant fait une tentative de suicide, grâce à un suivi coordonné dans les semaines suivant l’acte. Ce dispositif a été progressivement déployé à partir de 2020 dans quatre territoires de la région :
- Clermont-Ferrand (Auvergne) : 101 dossiers suivis depuis juillet 2020
- Lyon (Rhône) : 394 dossiers suivis depuis février 2020
- Saint-Étienne (Loire) : 210 dossiers suivis depuis octobre 2020
- Grenoble (Savoies) : 374 dossiers suivis depuis juin 2020
Une attention accrue portée aux personnes endeuillées par suicide
Chaque année en France, environ 100 000 personnes sont confrontées à la perte d’un proche par suicide. Ce vécu de deuil particulier peut entraîner un risque accru de souffrance psychique, voire de comportements suicidaires.
Pour répondre à cet enjeu, le ministère en charge de la santé a lancé en août 2025 un plan national de lutte contre la contagion suicidaire. Ce plan prévoit notamment de renforcer les actions de postvention au niveau régional pour répondre à un double enjeu : accompagner les proches endeuillés par un suicide et soutenir les professionnels de santé et médico-sociaux souvent confrontés à ces situations.
L'ARS Auvergne-Rhône-Alpes a déjà engagé un travail avec les acteurs en région et prévoit son renforcement.
Du côté des professionnels, l’Agence accompagne les établissements sanitaires et médico-sociaux dans la mise en place de démarches cohérentes de postvention. Des dispositifs spécifiques de soutien et de sensibilisation ont été développés au travers de fiches repères.
D’ici 2026, un réseau régional d’animateurs sera formé pour diffuser une culture commune de postvention et renforcer la capacité d’intervention en contexte de crise au niveau de la région. Il sera complété par une plateforme en ligne d'appui afin d’aider les équipes confrontées au suicide de leurs patients.
Pour les proches endeuillés, l’ARS Auvergne-Rhône-Alpes s’appuie notamment sur la plateforme numérique ESPOIR. Accessible à tous depuis mars 2023, elle centralise les ressources disponibles et propose un espace de questions-réponses animé par des psychologues et psychiatres, des contenus validés scientifiquement ainsi qu’une cartographie interactive des dispositifs d’accompagnement existants dans la région. En parallèle, des structures spécialisées comme le centre de prévention du suicide du Vinatier ou les services de psychiatrie des CHU de la région poursuivent leur mission d’accueil et de soutien auprès des familles touchées
Ces dispositifs, conjuguant écoute, intervention et accompagnement, constituent des leviers essentiels pour prévenir les passages à l’acte et limiter les risques de récidive. Ils s’inscrivent dans la stratégie régionale de prévention du suicide fondée sur la proximité, la réactivité et le maintien du lien.
Une nouvelle feuille de route régionale pour structurer l’action notamment à destination des jeunes publics
L’ARS Auvergne-Rhône-Alpes a publié au début du mois une nouvelle feuille de route régionale en santé mentale 2025-2028, qui prévoit notamment un volet dédié à la lutte contre le suicide. Ce document stratégique définit plusieurs priorités opérationnelles, avec une attention particulière portée aux jeunes publics, plus exposés aux troubles psychiques et aux idées suicidaires.
Parmi les axes structurants fixés pour la santé mentale des jeunes :
- Le renforcement de la prévention et du repérage précoce, notamment en milieu scolaire et universitaire notamment au travers du déploiement en cours du module de formation Sentinelle en milieu universitaire avec l'appui de l'association Nightline dans la région.
- L’amélioration de l’accès aux dispositifs de soutien (Maisons des adolescents, consultations jeunes, plateformes d’écoute)
- La poursuite du déploiement de dispositifs comme le 3114 et VigilanS
- La prévention des suicides sur les lieux identifiés comme à risque (hotspots suicidaires), en lien avec les collectivités