Les enjeux des légionelles en Auvergne-Rhône-Alpes
La présence de légionelles dans l’eau est un sujet de préoccupation majeur pour la santé publique. Ces bactéries, à l'origine de la légionellose, peuvent entraîner de graves complications respiratoires en cas d’inhalation de gouttelettes ou aérosols contaminés par une eau présentant une forte concentration de légionelles (en savoir + sur la légionellose).
En Auvergne-Rhône-Alpes, entre 200 et 400 cas de légionelloses sont déclarés chaque année et parmi eux de nombreux cas sont liés à des réseaux d’eau chaude sanitaire collectifs d’où l’importance de sensibiliser et accompagner les bailleurs, les régies ou les syndics de copropriété.
Les acteurs mobilisés en région
Le rôle de l’Agence régionale de santé (ARS) Auvergne-Rhône-Alpes
La déclaration obligatoire de la légionellose donne lieu à une enquête épidémiologique et environnementale réalisée par l’ARS Auvergne-Rhône-Alpes pour rechercher l’origine de la contamination et faire cesser l’exposition des personnes. L'objectif de l’enquête est d'identifier le plus rapidement possible l'origine de la contamination.
Lorsque le malade est domicilié dans un immeuble avec une production d’eau chaude sanitaire collective, l’ARS Auvergne-Rhône-Alpes sollicite le bailleur, la régie ou le syndic de copropriété pour obtenir des résultats d’analyses légionelles sur les réseaux d’eau et des éléments permettant d’estimer sa gestion vis-à-vis du risque de prolifération des légionelles.
Dans le cadre de cas groupés de légionellose, l’ARS Auvergne-Rhône-Alpes peut faire procéder à des prélèvements, par un laboratoire Comité français d'accréditation (COFRAC), pour l'analyse des légionelles.
Le rôle des bailleurs, régies et syndic de copropriété
Les bailleurs, régies ou syndics de copropriété doivent :
Mener toutes les actions préventives nécessaires pour limiter le développement des légionelles dans les réseaux d’eau chaude sanitaire (ESC) des immeubles d’habitation avec production d’ECS collective,
Faire réaliser une analyse des risques,
Surveiller leurs installations,
Mener toutes les actions correctives et curatives et de sécurisation des occupants nécessaires en cas de présence de Legionella pneumophila,
Prévenir les usagers en cas de présence de Legionella pneumophila afin qu’ils soient vigilants devant tous signes évocateurs de légionellose et qu’ils consultent un médecin en cas de symptômes.
Légionelles : vos obligations et les procédures à suivre
Si les immeubles d’habitation ne sont pas soumis aux mêmes obligations réglementaires que les établissements recevant du public (ERP), le code de la santé publique précise notamment dans ses articles L.1321-1 et L.1321-4 l’obligation de surveiller la qualité de l’eau distribuée, de prendre toutes mesures correctives nécessaires en vue d’assurer la qualité de l’eau et d’informer les consommateurs en cas de risques sanitaires.
L’arrêté du 30 novembre 2005 et sa circulaire d’application du 3 avril 2007 précisent les exigences à respecter en matière de température afin de limiter le risque lié au développement de légionelles dans les systèmes de distribution d’eau chaude sanitaire.
Les logements loués à titre de résidence principale doivent être “décents” au sens du décret du 30 janvier 2002 ce qui signifie que la nature et l’état de conservation et d’entretien des canalisations du logement ne présentent pas de risques manifestes pour la santé des locataires, et que les équipements de production d’eau chaude sont conformes aux normes de sécurité définies par les lois et règlements et sont en bon état d’usage et de fonctionnement.
Les syndics de copropriété, propriétaires et gestionnaires d’immeubles d’habitation sont responsables de l’entretien et de la maintenance de la production et de la distribution d’eau chaude sanitaire collective de l’immeuble. A cet effet, les règles de bonnes pratiques d’entretien des réseaux d’eau chaude sanitaire sont notamment rappelées dans les annexes 3 et 4 du guide du conseil supérieur d’hygiène publique de France “Gestion du risque lié aux légionelles (novembre 2001). Les jugements existants en la matière montrent que la responsabilité civile et pénale des syndicats de copropriétaires, des sociétés HLM, mais aussi des gestionnaires des réseaux de chauffage urbain, des gestionnaires des installations de production et de distribution d’eau chaude sanitaire et des copropriétaires (notamment bailleurs) peut être engagée en cas de manquement à ces obligations réglementaires, voire en cas de survenue d’un cas de légionellose parmi les habitants de l’immeuble.
La maîtrise du risque sanitaire légionelles est basée sur le respect de trois grands principes :
Maîtriser la température de l'eau dans les installations par une conception et un suivi adaptés ;
Assurer une bonne circulation de l'eau et éviter toute stagnation ;
Lutter contre l'entartrage et la corrosion des réseaux.
Il est possible d’agir à plusieurs niveaux pour prévenir la présence de légionelles.
Mesures de maîtrise et contrôle des installations
La maîtrise en permanence de la température consiste à distribuer à des températures :
supérieures à 55°C en sortie de production,
supérieures à 50°C en tout point de l’installation collective de distribution,
inférieures à 20°C pour le réseau d’eau froide. Le calorifugeage distinct des réseaux d’eau froide et d’eau chaude peut contribuer au respect de ces consignes de température.
La température de l’eau doit être contrôlée au moins une fois par mois, tant au niveau de la sortie de production et du retour de boucle (le cas échéant), que des points d’usage à risque les plus représentatifs du réseau, ou à défaut les plus éloignés de la production.
Mesures de lutte contre la stagnation de l’eau
Les gestionnaires d’habitats collectifs doivent éviter la stagnation de l’eau en :
Privilégiant une production instantanée ou semi-instantanée (échangeurs à plaques, etc.) aux ballons de stockage
Privilégiant un bouclage du réseau d’eau chaude sanitaire, qui contribue aussi à maintenir une température suffisante et homogène des canalisations
S'assurant de la bonne circulation de l’eau en cas de réseau bouclé (équilibrage, vérification du bon fonctionnement de la pompe de recirculation, entretien des organes d’équilibrage)
Recherchant et supprimant les bras morts (parties de réseau non utilisés), ou à défaut, en les purgeant régulièrement
En faisant couler l’eau chaude et froide dans les logements 2 à 3 minutes au moins une fois par semaine au niveau des points d’eau peu utilisés, et après chaque période d’absence prolongée, avant de réutiliser les points d’eau (notamment douche)
Mesures pour lutter contre la corrosion et l’entartrage
Les bailleurs, régies ou syndics de copropriété doivent prévenir la corrosion en privilégiant des matériaux résistant à la corrosion et aux températures élevées (en évitant par exemple l’acier galvanisé).
Une lutte contre le tartre doit également être menée en :
Vidangeant, détartrant (si nécessaire) et désinfectant au moins une fois par an les dispositifs de stockage de l’eau
Nettoyant, détartrant (par exemple avec une solution de vinaigre blanc), et en désinfectant (trempage dans une solution d’eau de javel) au moins une fois par an les éléments de robinetterie (flexibles, pommeaux de douche, mousseurs ou aérateurs ...) voire en remplaçant les éléments vétustes, y compris les têtes de robinet.
Des traitements de lutte contre la corrosion et le tartre existent si nécessaire mais nécessite un suivi rigoureux.
Mesures de maintenance et de surveillance des installations
Les bailleurs, régies ou syndics de copropriété doivent également assurer une maintenance et une surveillance régulières des installations d’eau chaude.
Ils doivent assurer notamment des chasses régulières en fond de ballon et en points bas des circuits.
Afin de s’assurer de l’efficacité des mesures de prévention mises en œuvre, il est également recommandé de faire réaliser des analyses de légionelles par un laboratoire accrédité par le COFRAC au moins une fois par an au niveau du fond de ballon, du retour de boucle, et de points d’usage représentatifs (milieu de réseau) ou à défaut les plus éloignés de la production d’eau chaude.
Evaluation des risques relatifs aux installations intérieures de distribution d’eau destinée à la consommation humaine (EDCH)
Les bailleurs, régies ou syndics de copropriété pourront également faire réaliser une évaluation des risques conformément à l’arrêté du 30 décembre 2022 relatif à l'évaluation des risques liés aux installations intérieures de distribution d'eau destinée à la consommation humaine.
L’évaluation des risques est à faire réaliser par un professionnel disposant de compétences et de qualifications dans le domaine des réseaux d’eau sanitaire dans les bâtiments qui pourront s’appuyer sur le guide d’application sur l'analyse des risques relative aux installations intérieures de distribution d'eau destinée à la consommation humaine (EDCH) de l’ASTEE et du CSTB. L’évaluation des risques consiste en une analyse des risques puis la mise en place d’une surveillance de la qualité de l’eau selon les conclusions de l’analyse de risque.
Que faire en cas de dépassement des seuils de légionelles ?
Toute détection de légionelles, même en dessous du seuil, révèle un dysfonctionnement des réseaux d’eau nécessitant la vérification des installations, la recherche de l’origine possible du développement des légionelles et la mise en place d’actions correctives.
En cas de dépassement du seuil, il est impératif de mettre immédiatement en œuvre un plan d’actions afin de garantir la sécurité des usagers et de rétablir la qualité de l’eau.
Prendre toutes les mesures nécessaires pour supprimer l’exposition : restriction des usages à risque aux points d’eau, pose de filtres anti-légionelles.
Mettre en œuvre des actions pour rétablir la qualité de l’eau : rechercher des dysfonctionnements, contrôler les températures, soutirer tous les points d’eau, purger les réseaux, vérifier les réglages des installations, entretenir les points d’eau. Il pourra également être nécessaire de faire réaliser une désinfection du réseau d’eau.
S’assurer de l’efficacité des mesures par une nouvelle campagne d’analyse des légionelles 2 à 8 semaines après leur mise en œuvre et montrant des résultats conformes. En cas de désinfection choc, réaliser également un contrôle au moins 48 h après le traitement.
Si la contamination persiste malgré les mesures immédiates, il faut faire appel à un professionnel qualifié pour diagnostiquer les dysfonctionnements à l’origine de la contamination et élaborer le plan d’action. Les bureaux d’études certifiés QB24 par le Centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB) disposent des compétences reconnues pour établir ce diagnostic technique.
Information du public
En cas de contamination du réseau d'eau par des légionelles, il est essentiel d'informer rapidement et efficacement les usagers afin de prévenir tout risque sanitaire. La communication doit être claire, accessible et diffusée par plusieurs canaux (affichage dans les parties communes, courriers, courriels, SMS, site internet, etc.). Le message doit préciser la nature du risque, les mesures de précaution à adopter (éviter l’usage des douches et des brumisateurs, privilégier l’eau froide pour l’usage domestique, etc.), ainsi que les actions mises en place pour rétablir la qualité de l’eau. Il est également recommandé d’orienter les résidents vers des sources d’information fiables et de maintenir une communication régulière jusqu’à la résolution complète du problème.
En cas de contamination d’un réseau d’eau d’un immeuble avec une production d’eau chaude sanitaire collective par des légionelles, le bailleur, la régie ou le syndic de copropriété peut le signaler à l’ARS Auvergne-Rhône-Alpes qui s’assurera alors de l’absence de cas de légionellose signalé en lien avec cet immeuble d’habitation.