Saturnisme : comment se protéger d'une exposition par le plomb ?

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L’exposition au plomb par ingestion ou inhalation est toxique. L’intoxication par le plomb est appelée saturnisme.
Tout cas de saturnisme infantile (plombémie supérieure à 50 µg/l chez une personne mineure) doit faire l'objet d'une déclaration obligatoire à l'ARS par le médecin qui a prescrit la plombémie.

Qu'est-ce que le saturnisme ?

Le saturnisme correspond à une intoxication au plomb aux effets particulièrement nocifs chez l'enfant, ainsi que chez la femme enceinte et son bébé.

Le plomb n’a aucun rôle connu dans le corps humain : sa présence dans l’organisme provient toujours d’une exposition externe, par ingestion (aliments contaminés, mains non lavées ou objets/poussières contaminés portés à la bouche) ou inhalation (respiration de poussières ou de vapeurs).

Quelles sont les personnes les plus sensibles au plomb ?

Les enfants de moins de 7 ans, et plus particulièrement entre 1 et 3 ans, constituent la population la plus à risque car :

  • ils portent spontanément mains et objets à la bouche et ingèrent ainsi de grandes quantités de poussières ;
  • les effets toxiques du plomb chez l’enfant sont plus importants et plus sévères que chez l’adulte, pour une même imprégnation, en raison des processus de développement cérébral ;
  • près de 50 % du plomb ingéré passe dans le sang chez l’enfant contre 10 % uniquement chez l’adulte.

Les femmes enceintes sont également une population à risque car une exposition au plomb, pendant leur enfance ou leur grossesse, peut être à l’origine d’une contamination de l’enfant qu’elles portent et d’effets indésirables sur la grossesse.

L’intoxication au plomb (ou saturnisme) peut avoir des conséquences graves, mêmes aux plus faibles doses d'exposition, chez les enfants (baisse du quotient intellectuel, baisse de l’audition, problèmes de croissance, troubles neurologiques et digestifs), et les femmes enceintes (accouchement prématuré, avortement, retard cognitif pour l’enfant).

Quels sont les symptômes du saturnisme ?

Les signes d’intoxication par le plomb sont peu spécifiques et la plupart du temps non détectables à l’examen clinique, ce qui rend le diagnostic clinique difficile. Le diagnostic ne peut être établi que par le dosage de la plombémie suite à une prise de sang (mesure de la concentration en plomb dans le sang) en présence de facteurs de risque d’exposition, individuels ou environnementaux.

Comment définie-t-on un cas de saturnisme ?

Un cas de saturnisme chez l’enfant de moins de 18 ans (saturnisme infantile) est défini lorsque la plombémie indique un résultat supérieur à 50 microgrammes de plomb par litre de sang (> 50 µg/L). Les professionnels de santé doivent obligatoirement déclarer les cas de saturnisme infantile auprès de l'Agence régionale de santé.

Chez l’adulte, il n’est pas établi un niveau de plombémie définissant le saturnisme mais il est possible de comparer sa plombémie aux plombémies mesurées en moyenne dans la population adulte française, dans les études dites « d’imprégnation » réalisées par Santé Publique France.

L’étude d’imprégnation Esteban (Imprégnation de la population française par le plomb. Programme national de biosurveillance, Esteban 2014-2016. (santepubliquefrance.fr)) a évalué que la population française adulte présente :

  • une concentration moyenne à 18,5 µg/L,
  • une plombémie supérieure à 39,05 µg/L pour 10% d'entre eux
  • une plombémie supérieure à 50,38 µg/L pour 5% de la population

Les cheveux ont aussi été utilisés en tant qu’indicateurs épidémiologiques d’exposition, dans la mesure où les métaux lourds sont concentrés dans les poils des mammifères. Le prélèvement d’un échantillon de cheveux à ras du cuir chevelu et la concentration dans les premiers centimètres permettent d’obtenir le degré moyen d’exposition d’une période de quelques mois (le cheveu pousse d’environ 1 cm par mois, avec un temps de latence d’un mois entre la formation du cheveu dans les cellules matrices en contact avec le sang capillaire et son apparition à la surface du cuir chevelu). Le plomb dans les cheveux est ainsi moins sensible à des variations rapides comme celles pouvant être rencontrées pour la plombémie.

Cependant, la contamination externe du cheveu peut induire une surestimation de l’imprégnation saturnine : les modes de préparation, en particulier le lavage, et la mesure ne permettent pas de différencier le plomb interne au cheveu et le plomb issu d’une contamination externe du cheveu.

De plus, contrairement à la plombémie, il n’y a ni données de comparaison (distribution des concentrations en plomb dans les cheveux dans la population générale), ni système de référence bien établi (définissant les mesures à mettre en œuvre selon le niveau de concentration mesurée dans les cheveux).

Lorsqu'un cas est déclaré à l'ARS, une enquête environnementale est alors conduite sur les lieux de vie de l’enfant, par l’Agence ou les services communaux d’hygiène et de santé, afin de déterminer les sources d’exposition au plomb. Des mesures de prévention et d’urgence sont demandées au propriétaire par le préfet lorsqu'il s'agit d'une exposition liée au lieu d'habitation.

L’ARS est par ailleurs destinataire des constats de risque d’exposition au plomb (CREP) réalisés en cas de vente et de tout nouveau bail de location pour les logements construits avant le 1er janvier 1949, lorsque des peintures au plomb dégradées ont été identifiées ou en présence d'un autre facteur de dégradation du bâti (plancher ou plafond effondré ou menaçant de s'effondrer, traces de coulure ou de ruissellement, moisissures ou traces d'humidité). Si le logement est occupé par des enfants, des mesures de prévention et d’urgence sont demandées au propriétaire par le préfet. Si les désordres mentionnés relèvent de la compétence des maires, le CREP leur est transmis pour suite à donner.

Quelles sont les sources d'exposition au plomb ?

Le plomb est naturellement présent dans notre environnement quotidien. Il existe des situations de sur-exposition liées à notre habitat, notre mode de vie, nos activités professionnelles et de loisirs, notre culture.

Parmi elles, on peut lister les sources liées à notre environnement et lieu de vie (logements anciens et parties communes présentant des peintures ou des canalisations en plomb, quartier à proximité d'un ancien site industriel ou minier, aires de jeux ou jardins familiaux à proximité d'une zone contaminée etc.) ou à notre alimentation (produits issus d'une culture exposée au plomb).

Certaines activités de la vie quotidienne peuvent aussi nous exposer au plomb  : 

  • Activités liées à notre mode de vie, culture (certaines vaisselles émaillées ou vernies, certains cosmétiques et remèdes traditionnels du type khôl...)
  • Activités professionnelles (entreprise du bâtiment et travaux publics, du ferraillage, de la démolition, de couverture etc.)
  • Activités de loisir (tir, chasse, pêche, poterie avec utilisation d'émaux, travail sur vitraux)

Des peintures au plomb ont été utilisées jusqu’en 1949 dans les logements et parties communes des immeubles d’habitation. Lorsqu’elles se dégradent ou que certains travaux sont réalisés, ces peintures constituent une source majeure d’intoxication via l’ingestion ou l’inhalation de poussières ou l’ingestion d’écailles de peinture.

Retrouvez la liste des bons réflexes à suivre pour vous protéger d'une exposition au plomb :

  • Consultez le Constat de risque d’exposition au plomb (CREP) réalisé sur votre logement : celui-ci doit être joint aux actes de vente ainsi qu’aux contrats de location signés après le 12 août 2008 (s’il ne l’a pas été, demandez-le au propriétaire ou au syndic de copropriété) ; le propriétaire est tenu de réaliser les travaux pour supprimer les risques d’exposition au plomb.
  • Recouvrez les peintures écaillées (avec du papier peint, de la toile de verre, ou du carrelage en fonction de l’humidité de la pièce) pour que l’enfant n’y ait plus accès.
  • Prenez des précautions lors des travaux sur les peintures (éloignez les enfants, changez de vêtements, éliminez les poussières après travaux…).
  • Procédez au nettoyage humide des sols (cela met moins de poussières en suspension dans l’air que le balai ou l’aspirateur) et aérer souvent votre logement pour en chasser l’humidité (cela évite la dégradation des murs).
  • Lavez souvent les mains des enfants, surtout avant les repas, couper les ongles courts.
  • Sortez le plus souvent possible les enfants du logement.
  • Donnez-leur des aliments riches en fer (ex. : poisson, volaille, légumes frais, œufs, chocolat, abricots secs…) et en calcium (ex. : laitages, fromages).
  • Adressez-vous à votre assistance sociale, votre médecin traitant ou votre centre de Protection maternelle et infantile (PMI) pour réaliser éventuellement une plombémie (mesure de la concentration en plomb dans le sang).

Si vous savez ou suspectez que vos canalisations sont en plomb.

Durant son trajet, la qualité de l’eau destinée à la consommation peut être altérée au contact du plomb, notamment pendant la nuit ou une absence prolongée. Si dans votre immeuble, les conduites d’eau potable sont en plomb, pour protéger votre santé et celle de vos enfants :

  • N’utilisez que l’eau froide pour les usages alimentaires (cuisson des aliments, boissons – café, thé, etc.).
  • Le soir, en période de forte utilisation, (au moment où le renouvellement de l’eau dans les conduites est important), profitez-en pour mettre de l’eau dans un récipient fermé, à conserver au réfrigérateur, pas plus de 24 heures. Le matin, n’utilisez que cette eau pour le petit déjeuner.
  • Après quelques jours d’absence, purger vos conduites en laissant couler l’eau avant de la boire.
  • Préférez l’eau embouteillée pour les nourrissons et les femmes enceintes.

Du fait de son interdiction déjà ancienne, la peinture d'origine contenant du plomb à l'intérieur des logements a généralement été recouverte et se trouve en sous-couche des revêtements apparents (peinture, papier peint, tissu, toile, etc.), voire doublage de divers types, le cas échéant. On la rencontre aussi bien sur les éléments de menuiserie que sur les surfaces murales et les plafonds. Certaines peintures anciennes décoratives, de type faux-bois, faux-marbre etc., que l'on trouve plus fréquemment dans les parties communes peuvent avoir été conservées sans être recouvertes et se trouveront alors directement en surface.

Tous les travaux susceptibles d'atteindre ou d'endommager les couches profondes de peinture, ou qui visent à les supprimer, présentent un risque d'exposition au plomb : préparation des fonds, ouverture de fissures, grattage, ponçage, décapage, percements importants, démolition de cloison, etc.

Il convient d'appliquer les règles suivantes :

  • Ne jamais réaliser des travaux en présence de jeunes enfants ou de femmes enceintes à proximité.

Avant de commencer les travaux :

  • Isoler le mieux possible la zone de travail du reste du logement, qu'il s'agisse d'une pièce ou d'une partie de celle-ci, et en interdire l'accès pendant les travaux (film polyane épais ou similaire). Assurer une bonne ventilation à l'intérieur de la zone de travail.
  • Retirer, protéger ou emballer le mobilier et les effets personnels ou les objets d'usage courant, vaisselle, etc., afin d'éviter qu'ils ne soient souillés par la poussière. Utiliser des films auto-adhésifs, plus pratiques.
  • Bâcher le sol avec un matériau à usage unique (film polyane épais ou autre).
  • Prévoir le matériel de nettoyage : formats de gaze imprégnée à usage unique ou à défaut serpillière qui sera jetée après usage, sacs poubelles épais, étanches et résistants, balai à franges qui sera jeté après usage.
  • Prévoir une protection individuelle pour les travaux pouvant produire de la poussière : masque respiratoire jetable (norme NF EN 149 FFP3S), combinaison de travail jetable, sur-chaussures. Ces équipements se trouvent facilement dans les magasins spécialisés ou de bricolage.
  • Prévoir un aspirateur équipé d'un filtre à haute ou très haute efficacité qui retiendra les particules fines. Ce matériel existe en location dans les magasins spécialisés dans la location d'outillage.

Mesures d'hygiène pendant les travaux :

  • Après chaque phase de travail, se laver les mains et le visage; prendre une douche en fin de journée.
  • Retirer ses vêtements de travail avant de circuler dans le logement et éviter tout contact avec les jeunes enfants durant les travaux.
  • Laver immédiatement en machine les vêtements utilisés pour les travaux s'ils ne sont pas à usage unique.

Comment procéder ?

  • Sur les surfaces murales et les plafonds :
    • Eviter le décapage quel qu'en soit le mode.
    • Préférer le recouvrement par un matériau de votre choix, selon l'usage de la pièce, à la simple application d'une peinture.
    • Privilégier le papier peint ou le papier à peindre, la toile de verre, etc., dans les pièces sèches, et la pose de carrelage dans les pièces humides.
    • Ne réaliser que les travaux de préparation des fonds strictement nécessaires : rebouchage de fissures, retrait de la peinture non adhérente...
    • Ne jamais poncer à sec les anciens revêtements. Si un égrenage est nécessaire, pulvériser la surface régulièrement avec de l'eau et utiliser un abrasif résistant à l'eau.
    • Ne jamais utiliser de ponceuse électrique pour retirer les anciennes couches de peintures.
    • Décoller les papiers peints à la décolleuse à vapeur plutôt qu'au grattoir.
    • Si une peinture est choisie et non un matériau de recouvrement, privilégier le lessivage des murs et plafonds avant toute mise en peinture ; appliquer une première couche d'impression pour bloquer les fonds avant l'application en deux couches de la peinture définitive.
  • Sur les menuiseries :
    • Eviter le décapage guel gu'en soit le mode. Si le décapage apparaît nécessaire, ne pas décaper la peinture à la flamme nue ou au décapeur thermique, mais préférer des décapants caustiques en phase aqueuse (éviter les solvants de type dichlorométhane).
    • Privilégier le remplacement des éléments mobiles en mauvais état : les fenêtres en particulier, mais aussi les plinthes.
    • Si les menuiseries sont en bon état et si vous décidez de les repeindre, procéder comme décrit pour les surfaces murales pour la préparation des fonds.
    • Pour la peinture de finition, préférer une peinture de type laque, plus résistante, en particulier pour les éléments soumis à un usage ou à un passage intensif ou régulier : portes, fenêtres, plinthes.
  • Pour les percements :
    • Préférer un outillage équipé d'un système de captation des poussières à la source.
    • Aspirer immédiatement les poussières produites ou résidus tombés au sol et procéder à un essuyage humide du sol.
  • Pour le nettoyage :
    • Nettoyer à l'avancement du travail : ne pas laisser s'accumuler au sol les poussières, déchets de peinture ou les résidus qui doivent être déposés dans un sac poubelle étanche et résistant au fur et à mesure de leur production.
    • Utiliser un aspirateur à haute ou très haute efficacité muni d'un filtre à particules (un aspirateur ordinaire refoule dans l'atmosphère les poussières fines).
    • En fin de tâche, replier soigneusement la bâche au sol et la déposer dans le sac poubelle réservé à la réception des déchets.
    • Utiliser des gazes, serpillères ou autres tissus humides à usage unique pour les nettoyages.
    • Le sol peut être lavé avec une solution d'eau additionnée de détergent, puis rincé à l'eau claire.
  • Pour l'élimination des déchets :

Voir avec le gestionnaire des déchets de votre commune pour l'élimination en déchetterie des sacs contenant les déchets (bâche, poussières, écailles, vieux papier peint, résidus de peinture, filtres d'aspirateur, combinaison et formats de nettoyages, etc.) et des éléments de menuiserie retirés (fenêtres, portes, etc.), les gravats, carrelages.

Mesures d’hygiène

  • Lavez-vous soigneusement les mains plusieurs fois par jour.
  • Veillez à avoir des ongles coupés courts,
  • Évitez le contact direct avec les terres contaminées pour les petits qui portent les doigts à leur bouche.
  • Lavez fréquemment les jouets des enfants.

Conseils pour l'entretien du logement 

  • Nettoyage humide du sol des habitations (préférer la serpillière au balai ou à l’aspirateur qui remettent les poussières en suspension sans les éliminer)
  • Limiter l’entrée de poussières extérieures :
    • par les chaussures, les objets, les animaux domestiques qui rapportent des poussières via leurs poils...
    • par le lavage régulier des rebords de fenêtres et des sols en dur autour des habitations (aire de jeu...)
  • Eviter si possible les sols nus (terre) autour des habitations : préférer les zones de jeux enherbées, les recouvrir par dallage, graviers...
  • Préférer les sols et revêtements facilement lavables dans les habitations (carrelages, parquets…) ; éviter tapis et moquettes qui retiennent les poussières

Cultures potagères et alimentation

  • Diversifiez votre alimentation : ne consommez pas uniquement les légumes provenant des jardins.
  • Consommez des aliments riches en fer (poisson, volaille, légumes frais, œufs, chocolat, abricots secs…) et en calcium (laitages, fromages…).
  • Nettoyez avec précautions les fruits et légumes.
  • N’utilisez pas l’eau des puits privés sans en connaître la qualité. 
  • Changez de tenue après avoir jardiné.

Ces mesures sont valables également en cas de présence d’autres métaux dans le sol (arsenic, cadmium, mercure).