La semaine mondiale de sensibilisation au bon usage des antibiotiques et à l'antibiorésistance, qui se déroule du 18 au 24 novembre, vise à attirer l'attention sur un enjeu de santé publique majeur : la résistance aux antibiotiques. Ce phénomène global représente une menace sérieuse pour la santé humaine, animale et environnementale. En France, comme dans de nombreux autres pays, la lutte contre l'antibiorésistance est devenue une priorité pour garantir l'efficacité des traitements antibiotiques, maintenir la sécurité des soins et éviter un retour à l'ère pré-antibiotique.
Cette semaine est l'occasion de rappeler les chiffres clés sur l'ampleur du phénomène et de mettre en lumière les actions menées pour limiter son impact. En 2024, la semaine mondiale se place sous le signe de la démarche « Une seule santé », une approche intégrée qui relie la santé humaine, animale et environnementale. Cette approche se reflète dans les actions de prévention et de contrôle des infections, le bon usage des antibiotiques (BUA) et le renforcement des collaborations entre les différents secteurs.
La lutte contre l'antibiorésistance en France : état des lieux et perspectives
La France reste l'un des pays les plus consommateurs d'antibiotiques en Europe. Bien que la consommation d'antibiotiques ait diminué en 2023, selon les tendances observées avant la pandémie Covid, elle reste élevée par rapport aux autres nations européennes. En santé humaine, l'utilisation excessive d'antibiotiques concerne les trois secteurs de soins (ville, établissements de santé, établissements médico-sociaux) et entraine une résistance aux antibiotiques utilisés en première intention.
Les chiffres clés de l'antibiorésistance en France
En 2023, des données inquiétantes ont été révélées concernant les résistances aux antibiotiques. Parmi les bactéries les plus préoccupantes, Escherichia coli, responsable de nombreuses infections urinaires, présente une résistance croissante aux fluoroquinolones, une famille d'antibiotiques utilisés pour traiter les infections urinaires les plus graves. En 2023, 13,5% des souches d'E. coli isolées de prélèvements urinaires de ville étaient résistantes aux fluoroquinolones, un chiffre en hausse constante d’après les données de la mission PRIMO. La résistance du Staphylococcus aureus à la méticilline (SARM) et d’Enterococcus faecium à la vancomycine, des bactéries fréquentes dans les infections associées aux soins, continue de poser un défi majeur dans les établissements de santé.
L'impact des résistances et les actions de prévention
La résistance aux antibiotiques a des conséquences lourdes sur la santé publique et sur l’économie. En France, environ 25 000 décès par an sont attribués à des infections causées par des bactéries résistantes aux antibiotiques, soit un nombre de morts supérieur à celui des accidents vasculaires cérébraux. Le coût des infections résistantes est également élevé, avec des dépenses directes estimées à 1,5 milliard d'euros par an, sans compter les coûts indirects liés à la prolongation des hospitalisations et la perte de productivité.
La perspective « Une seule santé » : une réponse globale à un enjeu mondial
La semaine mondiale de sensibilisation 2024 se place dans le cadre de cette démarche transversale. Elle met en avant les efforts collectifs pour surveiller, prévenir et combattre la résistance dans les secteurs de la santé humaine, animale et environnementale. En particulier, la France participe activement à des initiatives internationales telles que le projet ENOVAT, qui vise à optimiser l'utilisation des antimicrobiens en santé animale, et l’action conjointe européenne EU-JAMRAI2, qui soutient la mise en œuvre de plans d’action nationaux et l'échange de bonnes pratiques au niveau européen.
Des progrès, mais des efforts à poursuivre
La collaboration transdisciplinaire s'intensifie, comme en témoigne le projet PROMISE, qui se concentre sur la compréhension des interactions entre la santé humaine et animale, tout en soulignant l'importance d'un engagement renforcé de la part des patients et des professionnels de santé. De nouveaux outils de surveillance et de prévention sont continuellement développés pour répondre à l'ampleur de la crise de l'antibiorésistance, notamment en matière de prévention des infections et de promotion du bon usage des antibiotiques. (Retrouvez une boite à outils en matière d'antibiorésistance à destination des professionnels de santé répertoriés par l'ARS).
La France, avec ses actions au niveau national et international, continue de prendre part à cette lutte contre l'antibiorésistance, un combat mondial qui nécessite une coopération entre tous les secteurs de la société.
Les dernières actions menées en Auvergne-Rhône-Alpes pour le bon usage des antibiotiques et la lutte contre l’antibiorésistance
L’Agence régionale de santé (ARS) Auvergne-Rhône-Alpes est engagée auprès du Centre régional en antibiothérapie (CRAtb) pour renforcer les actions d’optimisation de l’utilisation des antibiotiques et de soutien à la bonne gestion des prescriptions.
Pour limiter cette résistance, des outils de prévention ont été développés pour aider les professionnels de santé à promouvoir le bon usage des antibiotiques.
Le CRAtb a mis en place des outils d’aide au diagnostic et à la prescription des antibiotiques pour les professionnels de santé exerçant dans les trois secteurs de soins, ainsi que des indicateurs de suivi des prescriptions d’antibiotiques et de l’antibiorésistance. Parmi les derniers outils proposés :
- Un guide de prescription des antibiotiques en Ehpad
- Un flyer d’information sur la bonne réalisation du prélèvement urinaire
- Un quiz sur les infections respiratoires
- Des webinaires destinés aux pharmaciens d’officine
- Une fiche de réévaluation de l’antibiothérapie dans les Ehpad
Dans le cadre de la semaine mondiale de sensibilisation 2024, le CRAtb organise également une journée de prévention à l'antibiorésistance et bon usage des antibiotiques à Lyon le 26 novembre.
Un dispositif innovant pour la déclaration des BHRe en Auvergne-Rhône-Alpes
L’ARS Auvergne-Rhône-Alpes, en collaboration avec le groupement de coopération sanitaire (GCS) Sara, a mis en place un dispositif innovant de déclaration des bactéries hautement résistantes aux antibiotiques (BHRe). Ce système a pour objectif de garantir une prise en charge optimale des patients porteurs de telles bactéries en facilitant l’information rapide et la coordination entre tous les professionnels de santé intervenant auprès d'un même patient. Lorsqu’un cas de BHRe est identifié, une déclaration centralisée permet d’informer immédiatement l’ensemble des acteurs concernés, qu’il s’agisse des médecins, des infirmiers, des pharmaciens ou des équipes de soins dans les hôpitaux et établissements de santé. Ce dispositif vise à déclencher les mesures sanitaires appropriées de manière rapide et concertée, telles que les précautions d’isolement, les ajustements thérapeutiques, ou encore la surveillance renforcée.
En favorisant une meilleure circulation de l’information, l'ARS et le GCS Sara contribuent à renforcer la sécurité des soins, à limiter la propagation des BHRe et à assurer une prise en charge adaptée aux risques infectieux, dans le respect des bonnes pratiques en matière de lutte contre l'antibiorésistance.