Contrôle des eaux de consommation (robinet) : ce qu’il faut savoir
La qualité des eaux de consommation est un enjeu majeur de santé publique. En Auvergne-Rhône-Alpes, l'Agence régionale de santé (ARS) mène un contrôle rigoureux des eaux de consommation, avec pour objectif de garantir leur conformité aux normes sanitaires et de préserver la santé des consommateurs. Ce processus complexe et méthodique se déroule tout au long de l’année et s’inscrit dans un cadre réglementaire strict.
Objectifs du contrôle
L’eau distribuée au robinet doit répondre à des normes de qualité définies par le Code de la santé publique et par la réglementation européenne. Ces normes visent à garantir l’absence de substances nocives, la sécurité microbiologique, ainsi que des caractéristiques physico-chimiques satisfaisantes. Des contaminants tels que les bactéries, les virus, les nitrates, les pesticides, ou encore les métaux lourds peuvent présenter des risques pour la santé. Le contrôle des eaux de consommation permet de prévenir ces risques, de détecter les anomalies et, le cas échéant, de mettre en œuvre des actions correctives.
La surveillance du respect des normes de qualité relève, en premier lieu, de la responsabilité des personnes responsables de la production et de la distribution de l’eau (PRPDE). En fonction de l’organisation locale, il s’agit de la commune, du syndicat intercommunal, d’une société privée…
L’ARS Auvergne-Rhône-Alpes assure un contrôle sanitaire de la qualité des eaux de consommation, de deuxième niveau, en vérifiant le respect des normes en vigueur et la sécurité sanitaire des réseaux d’eau. Ce contrôle permet aussi de s’assurer du bon exercice de la responsabilité des PRPDE en matière de surveillance.
Les installations contrôlées
Le contrôle sanitaire s’applique à l’ensemble du cycle de distribution des eaux de consommation. Les installations surveillées incluent :
- Les captages d’eau brute : sources, forages et rivières où l’eau est prélevée.
- Les usines de traitement : installations où l’eau est purifiée avant d’être distribuée.
- Les réseaux de distribution (UDI) jusqu’au robinet du consommateur : canalisations et réservoirs transportant et stockant l’eau vers les consommateurs, robinets dans les foyers, écoles, hôpitaux, restaurants, etc.
Ces contrôles visent à détecter des contaminations potentielles à toutes les étapes, garantissant une surveillance exhaustive.
Quand ce contrôle est-il réalisé ?
La fréquence des prélèvements et des analyses varie en fonction de plusieurs critères :
- La taille de la population desservie : les grandes agglomérations font l’objet de contrôles plus fréquents, parfois quotidiens, tandis que les petites communes rurales sont contrôlées quelques fois par an.
- Les caractéristiques locales : la vulnérabilité des sources d’eau, les conditions géologiques et hydrogéologiques et les installations influencent également la fréquence des tests.
- La nature des paramètres surveillés : les contrôles microbiologiques, liés à des risques immédiats, sont plus fréquents que les analyses des contaminants chimiques.
Quels sont les paramètres évalués ?
Le contrôle sanitaire de l’eau repose sur une soixantaine de paramètres répartis en trois grandes catégories :
- Microbiologiques : recherche de bactéries comme Escherichia coli, les coliformes, ou les entérocoques, indicateurs de contamination fécale.
- Chimiques : analyse de la présence de nitrates, pesticides, hydrocarbures ou métaux lourds tels que le plomb, le cuivre et l’arsenic.
- Physico-chimiques : contrôle du pH, de la dureté de l’eau, de la turbidité (limpidité) et d’autres paramètres influençant le goût et l’apparence de l’eau.
Bactéries, virus et parasites sont présents dans l’environnement, notamment dans les eaux brutes. Certains de ces micro-organismes peuvent être pathogènes, c’est-à-dire pouvant déclencher une maladie. Si la ressource n’est pas naturellement protégée de la contamination microbiologique, un traitement de désinfection doit être mis en place.
Quels sont les risques pour la santé ?
Une seule exposition à un micro-organisme suffit parfois à provoquer une maladie dont la gravité dépend du type de germe, de sa virulence, de la quantité de germes absorbée et de l’état de santé de la personne.
Si grâce à des efforts constants, les grandes épidémies d’origine hydrique (choléra, typhoïde) du début du XIXème siècle ne sont plus d’actualité, le risque infectieux se manifeste désormais sous la forme d’épisodes de gastro-entérites (diarrhées et vomissements).
Prévention-traitement
Les actions à mettre en œuvre afin de garantir la qualité microbiologique des eaux distribuées sont :
- L’instauration de la protection sanitaire des captages (périmètres de protection) ;
- La désinfection de l’eau.
Niveau de conformité au robinet du consommateur requis
0 Escherichia coli
0 Entérocoque
Les nitrates (NO3) sont naturellement présents dans l’environnement. En effet, l’azote est un élément essentiel à la vie des végétaux. Ils proviennent de la fixation de l’azote atmosphérique et de la décomposition de la matière organique par les micro-organismes. Dans ces conditions, les eaux ne contiennent pas plus de 10 mg/L de nitrates.
Les pollutions diffuses des nappes d’eaux superficielles et souterraines résultent des activités humaines : excédent d’amendements agricoles et rejets d’assainissement domestique.
Pour ce paramètre, l’évolution de la concentration, à la baisse ou à la hausse, est souvent lente.
Quels sont les risques pour la santé ?
Ce ne sont pas les nitrates en eux-mêmes qui présentent un risque sanitaire. C’est la transformation dans l’organisme, des nitrates en nitrites, qui compliquent le transport de l’oxygène par les globules rouges (méthémoglobinémie). Cette maladie peut provoquer des cyanoses chez le nourrisson (asphyxie).
A long terme, il semblerait que les nitrates puissent former des nitrosamines, molécules suspectées d'être cancérigènes.
L’eau ne constitue pas la seule source d'exposition aux nitrates. On trouve également des nitrates dans les légumes, les salaisons… En revanche, l’eau du robinet est la principale source d’exposition alimentaire aux nitrates pour les nourrissons.
Prévention-traitement
Les mesures de protection des captages sont primordiales, pour limiter l’apport de nitrates, notamment en encadrant l’utilisation d’engrais azotés. Cependant, les délais nécessaires pour une réhabilitation de la ressource peuvent être longs.
Enfin en cas de dépassement de la limite de qualité d’un captage, certains traitements peuvent être envisagés :
- Mélange avec une eau pauvre en nitrates avant distribution ;
- Traitement de l’eau par dénitratation sur résine ou par dénitrification biologique ;
- Abandon du captage pour une autre ressource de meilleure qualité.
Niveau de conformité au robinet du consommateur requis
NO3 : 50 mg/L
Les pesticides sont des substances chimiques utilisées en général pour lutter contre les espèces végétales indésirables et les organismes jugés nuisibles. Leur présence dans l’environnement est uniquement d’origine humaine. Ils sont principalement utilisés dans le milieu agricole mais le sont également pour des usages domestiques, urbains, de voiries et d’infrastructures.
La pollution des eaux par ces substances est liée à leur entraînement par ruissellement ou érosion (contamination des eaux de surface) ou par infiltration (contamination des eaux souterraines).
Pour ces paramètres, l’évolution de la concentration, à la baisse ou à la hausse, est souvent lente.
Quels sont les risques pour la santé ?
Les effets des pesticides pour des expositions répétées à de faibles doses pendant plusieurs années (toxicité chronique) sont encore mal connus. Cependant, ils sont susceptibles d’avoir des conséquences toxiques sur le système nerveux central et des effets cancérigènes voire mutagènes.
L’eau ne constitue pas la seule source d'exposition aux pesticides. Des résidus de pesticides sont également présents dans l’alimentation (fruits, légumes, céréales et produits céréaliers) et dans l’air.
Prévention-traitement
De même que pour les nitrates, les mesures de protection des captages sont primordiales, pour limiter l’apport de pesticides, notamment en encadrant leur utilisation. Comme pour les nitrates, les délais nécessaires pour une réhabilitation de la ressource sont longs.
En cas de contamination durable d’un captage, certaines mesures correctives peuvent être envisagées :
- Dilution avant distribution avec une eau de meilleure qualité ;
- Substitution de ressources ;
- Traitement des eaux avec des procédés complexes et onéreux : filtration sur charbon actif, oxydation à l’ozone ou filtration sur membrane.
En cas de présence de pesticides dans les eaux distribuées, au-delà de la norme sanitaire, la collectivité doit rechercher l’origine de la contamination et mettre en place un programme de mesures correctives, et, informer la population. Selon l’importance de la contamination, des procédures de dérogation ou de restriction de consommation pourront être engagées.
Niveau de conformité au robinet du consommateur requis
0,1 µg/L par substance (*sauf pour l’aldrine, la dieldrine, l’heptachlore et l’heptachlorépoxyde : 0,03 μg/L)
et 0,5 µg/L pour la totalité des substances
Ces limites ne constituent pas un seuil de risque pour la santé des consommateurs, mais révèlent une dégradation de la qualité de l’eau distribuée.
Le chlorure de vinyle monomère (CVM) est un produit chimique purement synthétique. Il n’existe aucune source naturelle de ce composé. Au niveau des eaux distribuées, sa présence résulte de la migration dans l’eau à partir de certaines conduites en PVC posées avant 1980 (et dans des cas exceptionnels d’une contamination de la ressource par des rejets industriels).
Niveau de conformité au robinet du consommateur requis
CVM : 0,5 µg/L
L’arsenic est un métalloïde présent naturellement dans notre environnement majoritairement sous sa forme minérale (90%).
Entrant dans la composition des roches métamorphiques ou cristallines, sa présence dans l’eau est principalement d’origine naturelle. L’eau circulant dans ce type d’aquifère dissout les dépôts minéraux ou les roches en contenant.
Les concentrations en arsenic dans les eaux peuvent montrer une forte variabilité temporelle en relation avec l’alternance des périodes d’étiage (basses eaux) ou de crue. Également les concentrations ont une forte variabilité spatiale, au sein d’une même structure hydrogéologique en fonction des circulations souterraines des eaux et de la nature des terrains rencontrés.
En pratique, la présence d’arsenic dans les eaux de consommation se retrouve généralement dans les secteurs de montagne reposant sur une géologie cristalline et / ou métamorphique. Les origines humaines sont très rares.
Quels sont les risques pour la santé ?
La principale source d’exposition à l’arsenic provient de l’eau de consommation, puis des aliments dont les produits de la mer. Les formes minérales de l’arsenic sont les plus toxiques. Absorbé par le corps il est transporté dans les divers organes par le flux sanguin.
Si la symptomatologie de l’arsenic semble différente selon les individus, les groupes de population et les zones géographiques, une exposition prolongée provoque le plus souvent des lésions dermiques.
L’arsenic inorganique est classé dans le groupe 1 (cancérogène certain pour l’homme) par le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC), et les personnes exposées présentent un risque accru de cancers de la vessie, du poumon et de la peau.
Prévention-traitement
S’il n’est pas possible de trouver une nouvelle ressource en eau, ne contenant pas d’arsenic, plusieurs procédés de traitement peuvent être utilisés, pour l’éliminer. Il s’agit de la précipitation/co-précipitation, la filtration membranaire ou l’échange d’ions. Cependant les procédés les plus efficaces sont les traitements par adsorption sélective comme la rétention sur les oxyhydroxydes ferriques (GEH), simple à mettre en œuvre et donc très adaptée aux petites collectivités.
Il est également possible de diluer les eaux arséniées avec des ressources exemptes d’arsenic.
Niveau de conformité au robinet du consommateur requis
Arsenic : 10 µg/L
Les PFAS font aussi l'objet d'une surveillance
Comment est organisé le contrôle sanitaire des eaux de consommation ?
Le contrôle sanitaire des eaux de consommation exercé par l’ARS Auvergne-Rhône-Alpes se déroule en plusieurs étapes :
- Prélèvements et analyses réguliers d’échantillons : L'ARS missionne un laboratoire agréé par l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES) pour effectuer des prélèvements d’eau et des analyses sur tous les réseaux d’eau de consommation de la région.
- Analyse des résultats : Les résultats des analyses sont interprétés par l’ARS qui prend les mesures nécessaires en cas de non-conformité et peut imposer des mesures correctives.
- Affichage des résultats : Les résultats des contrôles doivent être affichés en mairie. Ces résultats ainsi que des synthèses annuelles par réseau sont disponibles sur le site de l’ARS Auvergne-Rhône-Alpes.
Que se passe-t-il en cas de non-conformité ?
La personne responsable de la production et de la distribution de l’eau (PRPDE) doit prendre les mesures correctives nécessaires afin de rétablir la qualité de l’eau le plus rapidement possible.
L’ARS Auvergne-Rhône-Alpes évalue la situation sanitaire, et en fait part au préfet du département concerné, notamment si la distribution de l’eau constitue un risque pour la santé des consommateurs.
Par exemple, une contamination microbiologique peut nécessiter des mesures urgentes, tandis qu’une concentration chimique légèrement supérieure aux normes peut faire l’objet d’un suivi renforcé.
Selon les cas, les actions correctives mises en œuvre par la PRPDE peuvent être l’ajustement des traitements, le changement de ressource, une interconnexion, un mélange d’eau... Et si la consommation de l’eau présente un risque immédiat pour la santé, il peut être demandé une interdiction temporaire de consommation avec la mise en place de solutions de substitution (bouteilles d’eau, citernes).